« Dans la foi aborigène, une terre qui n’est pas chantée est une terre morte, puisque, si les chants sont oubliés, la terre elle-même meurt. »
« La plus grande partie de l’intérieur de l’Australie n’était que broussailles arides ou désert. Les pluies y tombaient toujours de façon très inégale et une année d’abondance pouvait fort bien être suivie par sept années de disette. Dans ce type de paysage se déplacer était vital, rester sur place suicidaire. « Mon pays » se définissait comme « l’endroit où je n’ai pas à demander ». Mais se sentir « chez soi » dans ce pays dépendait de la possibilité qu’on avait de le quitter. Chacun disposait au moins de quatre « chemins de sortie », sur lesquels il pouvait se lancer en temps de crise. Chaque tribu – bon gré mal gré – devait entretenir des relations avec ses voisins. »
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« Ibn Khaldûn fonda son système sur l’intuition que les hommes déclinent moralement et physiquement en se rapprochant des villes.
Les rigueurs du désert avaient, d’après lui, précédé la douceur des villes. Le désert était donc un réservoir de la civilisation et les gens du désert l’emportaient sur les sédentaires parce qu’ils étaient plus sobres, plus libres, plus courageux, plus sains, moins bouffis, moins lâches, moins enclins à se soumettre à des lois scélérates et, somme toute, plus faciles à guérir. »
Bruce Chatwin, Le Chant des pistes, Le Livre de poche, 2011, 414 pages.