« Il me reste le Refus pour survivre » – Paul Valet, La Parole qui me porte et autres poèmes

« Le poète est celui qui nous apporte l’essentiel. Il est celui qui porte en lui le surcroît d’être. Il est celui qui assume le néant, pour mieux le combattre et le détruire. »
Sophie Nauleau à propos de Paul Valet, préface.

Extraits :
ESPACES VAGABONDS
La vie du poète
Doublure déchirée de son œuvre
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Se rendre en spectateur
À son propre spectacle
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Dans ma volière cérébrale
Dorment des mots de proie
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Rejeter son moi ?
D’autres s’en empareront
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Se contredire
Souverainement
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Le fond de mes yeux
Est toujours en vacances
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Chaque homme est traversé
Par des voies sans issue
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Savoir
Se contenter du Cosmos

REVENIR DE LOIN
Au plus profond de l’oubli
Ma sombre forêt de paroles
Abrite une clairière indicible
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Redresser les colères
En ruine
**
Mon dernier carré de paroles
Sera hérissé de silence
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Être le dernier refuge
De tous les insurgés
**
Être perclus
De couleurs

LA MARCHE DU POETE
Quand on est soi-même
Une cible vivante
Il est dur de viser juste
Droit dans les yeux
Enfoncer le silence
Comme un coup de gong

TABLE RASE
Propre, balayé par la peur, mort bien portant moi-même, je m’en irai avec eux, loin dans le temps, habiter un poète impossible à venir.

LE RESCAPÉ
Et dans ma moindre parole
Il n’y a que des naufrages

POINTS DE CHUTE
Contre moi
Il n’y a pas de remède
**
Les poètes aboient
La poésie passe

PIERRE D’AIGLE
Le Vertige
Est mon point de repère

LE REFUS
POUR SURVIVRE
Dans ce monde clos de morts
Où l’espoir enterre l’espoir
Il me reste le Refus
Pour survivre

LA PAROLE QUI ME PORTE
SEUL
Pour trouver le juste mot
Il faut passer où nul ne passe
Jours sans recours
Nuits sans sursis
Aubes sans réponses
**
La parole qui me porte
Est la dure parole
Elle exige de moi
L’entière insoumission
**
Mon destin
Ce refus de l’Abri

MON ÉTOILE
Étoile filante de première grandeur
Où pourrais-je tomber sans désastre ?

MA PART
Ma poésie
Riposte à l’existence
Mon existence
Riposte à l’infamie
**
Je suis ce piège tendu
Devant la horde en marche
**
Surgi d’un sombre non lieu
D’un non lieu intouchable

PAROLES D’ASSAUT
Ma parole d’assaut
Est un désastre en marche
Je traverse mon visage
Ravagé comme une ville
Je traverse mon époque
Fulgurante et débile
Une rigueur sauvage
M’envahit quand j’écris
Le vouloir vivre
Fait ramper la vie
L’espoir et la peur
Pulvérisent l’Esprit
[…]
Paul Valet, La parole qui me porte et autres poèmes, préface de Sophie Nauleau, Poésie/Gallimard, 2020, 210 pages

Paméla Ramos

Née en 1980 en France, ancienne libraire, je travaille dans l'édition et la communication. Mes chroniques ici postées sont le reflet de ma passion principale : lire. Elles découlent de choix parfaitement libres et ne sont jamais rémunérées. Lorsqu'un livre m'a été offert, je l'indique.

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