« La plupart des voyageurs, ici, se satisfont de ce qu’ils voient depuis la fenêtre de leur véhicule ou la véranda de leur hôtel, et en allant d’un endroit à un autre, ils s’agrippent à leur train ou leur diligence comme des naufragés à leur radeau. Quand une excursion dans les bois est proposée, toutes sortes de dangers sont imaginés : serpents, ours, Indiens. Pourtant, il est bien plus sûr de se promener dans les bois de Dieu que de voyager sur des sur des routes encombrées ou de rester chez soi. Le danger représenté par les serpents est si faible qu’il mérite à peine d’étre mentionné. Les ours sont des créatures paisibles qui s’occupent de leurs affaires plutôt que d’errer comme des démons à la recherche d’une proie. Pauvres compagnons, ils ont été empoisonnés, piégés et pris pour cible jusqu’à perdre confiance en ce frère-humain ; il est dorénavant difficile de faire leur connaissance. Quant aux Indiens, la plupart sont morts ou civilisés dans un état d’innocence inutile.
Aucune solitude américaine de ma connaissance nest aussi dangereuse qu’une maison de ville équipée de tous les progrès modernes. On devrait aller dans les bois pour être en sûreté, si ce n’est pour une autre raison. »
John Muir, Préserver les solitudes, Parcs et forêts de l’Ouest sauvage, traduit par Martin Paquot, PUF, 2020, 106 pages.