« La question essentielle demeure : pourquoi ce qui devait arriver est-il arrivé ? Les dieux ont dû savoir que, dans son impatience, Orphée allait leur désobéir et que leur injonction ne pouvait que rendre cette impatience insupportable. Néanmoins, ils ne voulaient pas qu’Orphée regarde en arrière et plus tard ils le punirent inexorablement.
J’en suis venue à la conclusion que, en fait, ils ne voulaient pas qu’il s’aperçoive qu’Eurydice n’était pas là. Elle ne le suivait pas, en aucune manière et sous aucune forme. Les dieux ne voulaient pas qu’Orphée connaisse le secret de la mort : à savoir qu’elle est définitive, absolue. »
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« Il existe un étrange bonheur, qui ressemble à l’effet de la musique sur nous, dont nous faisons l’expérience, et qui a été vécu dans les temps orphiques, et qui résulte de l’absolue perte d’illusions, du pessimisme métaphysique qui imprègne l’histoire d’Orphée. »
Etel Adnan, Orphée face au néant suivi de Delphes et Kiato, L’Échoppe, 2016, 40 pages.